Pour l’UMR ASTRE du Cirad : Claire Garros, Thomas Balenghien
Pour l’OFB : Stéphanie Desvaux
Pour le comité de rédaction de la Plateforme ESA : Jean-Philippe Amat, Eric Cardinale, Sophie Carles, Julien Cauchard, Céline Dupuy, Guillaume Gerbier, Viviane Hénaux, Célia Locquet, Sophie Molia, Carlène Trévennec, Sylvain Villaudy.
Auteur correspondant : plateforme-esa@anses.fr
Le genre Culicoides rassemble des espèces de petits moucherons, cosmopolites en région tempérée et responsables de la transmission d’orbiviroses aux ruminants sauvages et domestiques, dont la fièvre catarrhale ovine (FCO) et la maladie épizootique hémorragique (MHE ou EHD en anglais).
Le cycle de développement des espèces implique des stades immatures (de l’œuf à la nymphe) se développant dans des substrats humides riches en matière organique d’origine végétale ou animale et un stade adulte évoluant dans le milieu aérien. Les larves des Culicoides peuvent être retrouvées dans une grande variété d’habitats : principalement dans la vase ou les boues qui entourent les collections d’eau (de la flaque au lac), les bords de rivières, ruisseaux ou tourbières, mais aussi les bouses ou les litières humides des grands vertébrés ou encore les trous d’arbre et les végétaux en décomposition. Si les habitats larvaires hébergent généralement des communautés d’espèces, les caractéristiques du milieu (salinité, pH, quantité de matière organique d’origine animale ou végétale, etc.) déterminent leurs compositions.
Dans les élevages de la région paléarctique, les larges zones boueuses, chargées en matière organique d’origine animale (urine, fèces) et piétinées par les animaux, sont identifiées comme des habitats larvaires préférentiels pour les espèces associées aux ruminants d’élevage. Parmi ces espèces, certaines sont cependant ubiquistes. Ainsi, les larves de C. obsoletus, espèce abondante et largement distribuée en région paléarctique (carte vectornet), sont capables de se développer dans les litières de forêt, dans des trous d’arbre, dans des résidus d’ensilage de maïs ou dans du fumier en voie de compostage. Cette grande plasticité permet à cette espèce d’être présente dans presque tous les milieux de son aire de distribution, quel que soit le type de sol, du niveau de la mer à plus de 2 000 m d’altitude, en pleine forêt ou dans des habitats anthropisés comme les élevages. A l’inverse, d’autres espèces peuvent être inféodées à un certain type d’hôte et d’habitat larvaire. Par exemple, C. chiopterus est associé aux bovins et les bouses sont les habitats larvaires de cette espèce. Les espèces de Culicoides classiquement reconnues comme vectrices de virus d’intérêt pour les ruminants domestiques en région paléarctique tempérée non-méditerranéenne (virus de la FCO, virus de Schmallenberg) sont : C. obsoletus, C. scoticus, C. chiopterus, C. dewulfi, C. pulicaris, C. punctatus, C. lupicaris, et C. newsteadi. D’autres espèces sont décrites comme ornithophiles.
Les données sur les communautés d’espèces de Culicoides paléarctiques associées à la faune sauvage sont rares. Une revue non exhaustive de la littérature la plus récente a été réalisée en ciblant les régions européennes partageant les mêmes communautés d’espèces que celles décrites en France. Ces suivis entomologiques ont été réalisés dans des environnements naturels permettant de caractériser la diversité et les abondances spécifiques, parfois les dynamiques des populations. Certains suivis ont permis d’analyser moléculairement les repas de sang des femelles capturées gorgées.
- Article 1 : Communautés d’espèces dans les écosystèmes aquatiques en Espagne (González et al. 2022)
Un suivi entomologique a été réalisé dans deux réserves naturelles (Urdaibai et Salburua) dans la région du Pays Basque, au nord de l’Espagne. Ces réserves sont connues comme zones d’hivernage ou d’arrêt pour les oiseaux migrateurs. Dans chaque réserve, cinq sites ont été suivis entre le 01/07 et le 31/10/2018 (2 sites) et le 01/05 et le 31/10/2019 (3 sites). Les piégeages ont été réalisés avec des pièges lumineux de type CDC appâtés avec de la carboglace, posé 24 h, toutes les deux semaines.
Un total de 4 945 Culicoides a été collecté sur les dix sites représentant 28 espèces. La diversité était dominée par cinq espèces ornithophiles, C. alazanicus (n = 1 238, 24,9 %), C. griseidorsum (n = 1 012, 20,3 %), C. poperinghensis (n = 808, 16,2 %), C. kibunensis (n = 531, 10,7 %) et C. clastrieri (n = 479, 9,6 %). Les espèces C. obsoletus, C. scoticus et C. dewulfi étaient également présentes dans les deux réserves mais plus rares (pour les 3 espèces, n = 66, 1,3 %). La dynamique était univoltine, avec un pic au début de l’été.
L’analyse des repas de sang (53 individus pour 8 espèces) a montré que des espèces ornithophiles (C. griseidorsum et C. poperinghensi) peuvent se gorger sur des mammifères sauvages et inversement, que des espèces mammophiles (C. obsoletus) peuvent prendre un repas de sang sur des oiseaux. Les repas pris sur mammifères sauvages étaient dominés par Cervus elaphus puis Sus scrofa.
- Articles 2 et 3 : Communautés d’espèces chez les ruminants domestiques et sauvages en Espagne (Talavera et al. 2018 ; Talavera et al. 2015)
Un suivi entomologique dans sept sites avec des communautés de ruminants sauvages importantes a été réalisé entre 2009 et 2010 (juillet à novembre) en Espagne. A chaque site de piégeage (localisé à plus d’1 km d’un élevage de ruminants domestiques), trois pièges à lumière noire ont été installés et mis en action pour trois nuits consécutives de capture, une fois par mois. Les données de diversité et d’abondance dans les élevages domestiques les plus proches étaient issues des données du réseau de surveillance des populations de Culicoides espagnol.
Un total de 102 693 spécimens ont été capturés représentant 40 espèces. Le nombre moyen d’espèces est supérieur dans les sites de ruminants sauvages (18) comparés aux sites de ruminants domestiques (13). Au moins une espèce d’intérêt vétérinaire (C. imicola, ou espèces des « groupes » Obsoletus ou Pulicaris) était présente à chaque site de capture.
Les communautés d’espèces aux sites avec des ruminants sauvages et domestiques étaient similaires (analyses de similarités (ANOSIM), global R = 0,175, p = 0,250), indiquant que la présence d’hôtes n’affecte pas la composition d’espèces des communautés.
Un total de 264 femelles gorgées, issues du suivi entomologique décrit ci-dessus, a été analysé afin d’identifier l’origine des repas de sang. Un total de 114 repas de sang a pu être identifié pour quatorze espèces de Culicoides dont C. obsoletus, C. scoticus, C. punctatus et C. imicola. Douze hôtes ont été identifiés (6 espèces de mammifères et 6 espèces d’oiseaux). Pour les repas de sang pris sur mammifères, les hôtes les plus fréquents étaient le cerf élaphe (C. elaphus, 66,7 %), l’espèce humaine (Homo sapiens, 13,0 %) et le daim européen (Dama dama, 6,1 %).
- Article 4 : piégeages en zone forestière en Lituanie (Bernotienė et al. 2021)
Un suivi entomologique a été réalisé dans le parc régional de Verkiai dans le nord de Vilnius, Lituanie. Ce parc est largement forestier, sans présence de ruminant domestique mais avec des communautés riches d’oiseaux et de mammifères sauvages. Des pièges à lumière noire de type OVI ont été posés en hauteur, une nuit/semaine de fin avril à mi-octobre en 2016 et 2018, et d’avril à juin en 2019, pour un total de 52 nuits de captures.
Un total de 7 332 femelles représentant 22 espèces a été capturé. Les espèces les plus abondantes, quelle que soit l’année, étaient C. obsoletus et les autres espèces du Groupe Obsoletus, puis C. kibunensis et C. impunctatus. Culicoides punctatus et C. chiopterus présentaient des abondances fortes certaines années. Le pic d’abondance a été observé en juin.
- Article 5: Communautés d’espèces en France (Rossi et al. 2019)
En France, un suivi entomologique a été réalisé entre juin et fin août 2008 dans cinq régions connues pour la présence importante de faune sauvage (Alsace, Bourgogne, Pyrénées, Alpes et Haut-Languedoc). Dans chaque département, un à dix sites ont été échantillonnés avec un piège à lumière noire de type OVI (1 à 4 nuits de capture consécutives). Les données de diversité et d’abondance des fermes les plus proches étaient issues du réseau de surveillance des populations de Culicoides français.
Un total of 51 380 Culicoides représentant au moins 30 espèces a été capturé. Les espèces les plus abondantes dans les sites naturels étaient C. obsoletus s.l./C. scoticus (59,1 %), C. furcillatus (17,7 %), C. achrayi (7,8 %), C. punctatus (6,1 %), C. pallidicornis (3,2 %), C. kibunensis (1,5 %), et C. festivipennis (1,5 %). Dans les cinq fermes sélectionnées, les espèces les plus abondantes étaient C. obsoletus s.l./C. scoticus (76,3 %), C. chiopterus (4,9 %), C. achrayi (2,9 %), C. pulicaris (2,6 %), C. lupicaris (1,9 %), C. dewulfi (1,4 %), et C. vexans (1,4 %).
Un total de 70 femelles gorgées a été identifié : dix sur bovins Bos taurus, six sur ovins Ovis aries ou mouflon Ovis musimon, cinq sur chevaux Equus caballus, neuf sur cerf élaphe Cervus elaphus, deux sur chevreuil Capreolus capreolus, un sur chamois Rupicapra rupicapra, et deux sur oiseau (genre Sylvia). Deux espèces, C. obsoletus et C. achrayi, ont été retrouvées gorgées à C. elaphus.
Conclusion
Ces travaux menés dans des milieux de forte présence de faune sauvage montrent que :
- La composition des communautés d’espèces de Culicoides ne dépend pas du type de ruminant présent. La diversité et la richesse spécifique peuvent varier entre des environnements d’élevage et des environnements naturels mais les espèces associées aux élevages de ruminants domestiques et épidémiologiquement d’intérêt peuvent être présentes et dominantes en milieu naturel.
- Il existe une plasticité des comportements trophiques pour les espèces dominantes dans les deux types d’environnement. Les espèces ornithophiles et mammophiles peuvent respectivement et de façon opportuniste se gorger sur un hôte d’un groupe différent. Le choix d’hôtes pourrait dépendre fortement de la disponibilité en hôte dans des préférences trophiques non strictes.
- La dispersion des femelles culicoïdes entre des milieux naturels et domestiques est observée.
Ainsi, les analyses de diversité et des comportements trophiques des espèces présentes en milieu naturel soutiennent l’hypothèse qu’elles peuvent servir de pont (bridge vector) entre les hôtes sauvages et les hôtes domestiques et jouer un rôle dans la transmission de virus entre les deux compartiments.
En ce qui concerne les implications de ces résultats pour la transmission des orbiviroses aux ruminants, très peu de données internationales sont disponibles sur l’infection des ruminants sauvages par le virus de la maladie hémorragique épizootique (EHD), en dehors des données nord-américaines. En Europe, à ce jour, un seul cas sauvage d’EHD a été détecté, sur un cerf élaphe (Cervus elaphus) (plus d’information dans le BHVSI-SA). L’expérience la fièvre catarrhale ovine a montré que les populations d’ongulés sauvages ne jouaient pas de rôle majeur dans la transmission du virus aux ruminants domestiques.
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Références
Bernotienė, Rasa, Galina Bartkevičienė, et Dovilė Bukauskaitė. 2021. « The Flying Activity of Biting Midges (Ceratopogonidae: Culicoides) in Verkiai Regional Park, Southeastern Lithuania ». Parasitology Research 120 (7): 2323‑32. https://doi.org/10.1007/s00436-021-07147-2.
González, Mikel A., Fátima Goiri, Sean W. J. Prosser, Aitor Cevidanes, Luis M. Hernández-Triana, Jesús F. Barandika, Paul D. N. Hebert, et Ana L. García-Pérez. 2022. « Culicoides species community composition and feeding preferences in two aquatic ecosystems in northern Spain ». Parasites & Vectors 15 (1): 199. https://doi.org/10.1186/s13071-022-05297-5.
Rossi, Sophie, Thomas Balenghien, Cyril Viarouge, Eva Faure, Gina Zanella, Corinne Sailleau, Bruno Mathieu, et al. 2019. « Red Deer (Cervus Elaphus) Did Not Play the Role of Maintenance Host for Bluetongue Virus in France: The Burden of Proof by Long-Term Wildlife Monitoring and Culicoides Snapshots ». Viruses 11 (10): 903. https://doi.org/10.3390/v11100903.
Talavera, S., F. Muñoz-Muñoz, M. Verdún, N. Pujol, et N. Pagès. 2018. « Revealing Potential Bridge Vectors for BTV and SBV: A Study on Culicoides Blood Feeding Preferences in Natural Ecosystems in Spain ». Medical and Veterinary Entomology 32 (1): 35‑40. https://doi.org/10.1111/mve.12263.
Talavera, Sandra, Francesc Muñoz-Muñoz, Mauricio Durán, Marta Verdún, Anna Soler-Membrives, Álvaro Oleaga, Antonio Arenas, Francisco Ruiz-Fons, Rosa Estrada, et Nitu Pagès. 2015. « Culicoides Species Communities Associated with Wild Ruminant Ecosystems in Spain: Tracking the Way to Determine Potential Bridge Vectors for Arboviruses ». PLOS ONE 10 (10): e0141667. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0141667.
Ce document créé dans le cadre de la Plateforme d’épidémiosurveillance en santé animale (ESA) peut être utilisé et diffusé par tout média à condition de citer la source comme suit et de ne pas apporter de modification au contenu « © https://www.plateforme-esa.fr/ »
mardi 6 juin 2023
Minuit et demi, on sort la batterie de rechange, ou on va se coucher ?
Au moment où nous commençons à remballer le matériel, un Tortricidae inconnu vient se poser sur le voile. Je ressors de ma poche l’appareil photo. L’entomologiste professionnel du groupe rouvre sa mallette et prélève le papillon pour l’examiner plus tard dans son laboratoire, sous une loupe binoculaire.
Quelques jours passent et le verdict tombe, il s’agit de Cochylis roseana, dont les chenilles ne se nourrissent que des graines des cardères sauvages (Dipsacus fullonum). Et c’est le première fois qu’il est observé en Ile-de-France. J’ose espérer, à voir les grandes quantités de cardères dans le parc du peuple de l’herbe, qu’il n’était pas le seul et unique de son espèce dans le secteur !
Retrouvez dans cet article la plante hôte de ce papillon :
Cardères
lundi 5 juin 2023
Olivier Capitanio, Président du Département du Val-de-Marne, et Laurent Roturier, directeur régional des affaires culturelles d’Île-de-France, ont signé le 5 juin 2023, la première convention stratégique de coopération culturelle au MAC/VAL, à Vitry-sur-Seine.
[image:Lucille Schoenhentz_LS_1303.jpg,d,small]Le Département et l’État, souhaitent ainsi enrichir et renforcer leur collaboration dans des actions communes en matières d’art et d’attractivité culturelle du territoire.
La signature de cette convention illustre l’ambition commune du Département du Val-de-Marne et de la Direction régionale des affaires culturelles d’Île-de-France (DRAC) de développer la place des arts et de la culture en Val-de-Marne et de définir un cadre de travail commun afin de renforcer la coopération, définir les enjeux, les objectifs et les champs d’intervention conjoints sur une période conventionnée de 3 ans.
Toutes les informations se trouvent dans le dossier de presse en pièce jointe.
La DRIEAT et la DRIHL, avec la participation du Département du Val d'Oise et de l'Agence Parisienne du Climat (APC), ont organisé le 21 juin prochain, un webinaire relatif aux politiques publiques d'aides à la rénovation énergétique du parc résidentiel privé francilien.
La DRIEAT et la DRIHL, avec la participation du Département du Val d'Oise et de l'Agence Parisienne du Climat (APC), ont organisé le 21 juin prochain, un webinaire relatif aux politiques publiques d'aides à la rénovation énergétique du parc résidentiel privé francilien.
L'année 2022 s'inscrit dans le contexte de la relance post-pandémie de Covid-19 et ses nombreuses conséquences. Cette année a été pour la DRIEAT, le début d'un nouveau chapitre au service des Franciliens et la création d'un nouveau collectif de travail post-fusion.
L'année 2022 s'inscrit dans le contexte de la relance post-pandémie de Covid-19 et ses nombreuses conséquences. Cette année a été pour la DRIEAT, le début d'un nouveau chapitre au service des Franciliens et la création d'un nouveau collectif de travail post-fusion.
L'année 2022 s'inscrit dans le contexte de la relance post-pandémie de Covid-19 et ses nombreuses conséquences. Cette année a été pour la DRIEAT, le début d'un nouveau chapitre au service des Franciliens et la création d'un nouveau collectif de travail post-fusion.
L'année 2022 s'inscrit dans le contexte de la relance post-pandémie de Covid-19 et ses nombreuses conséquences. Cette année a été pour la DRIEAT, le début d'un nouveau chapitre au service des Franciliens et la création d'un nouveau collectif de travail post-fusion.
Pour l’UMR ASTRE du Cirad : Claire Garros, Thomas Balenghien
Pour l’OFB : Stéphanie Desvaux
Pour le comité de rédaction de la Plateforme ESA : Jean-Philippe Amat, Eric Cardinale, Sophie Carles, Julien Cauchard, Céline Dupuy, Guillaume Gerbier, Viviane Hénaux, Célia Locquet, Sophie Molia, Carlène Trévennec, Sylvain Villaudy.
Auteur correspondant : plateforme-esa@anses.fr
Le genre Culicoides rassemble des espèces de petits moucherons, cosmopolites en région tempérée et responsables de la transmission d’orbiviroses aux ruminants sauvages et domestiques, dont la fièvre catarrhale ovine (FCO) et la maladie épizootique hémorragique (MHE ou EHD en anglais).
Le cycle de développement des espèces implique des stades immatures (de l’œuf à la nymphe) se développant dans des substrats humides riches en matière organique d’origine végétale ou animale et un stade adulte évoluant dans le milieu aérien. Les larves des Culicoides peuvent être retrouvées dans une grande variété d’habitats : principalement dans la vase ou les boues qui entourent les collections d’eau (de la flaque au lac), les bords de rivières, ruisseaux ou tourbières, mais aussi les bouses ou les litières humides des grands vertébrés ou encore les trous d’arbre et les végétaux en décomposition. Si les habitats larvaires hébergent généralement des communautés d’espèces, les caractéristiques du milieu (salinité, pH, quantité de matière organique d’origine animale ou végétale, etc.) déterminent leurs compositions.
Dans les élevages de la région paléarctique, les larges zones boueuses, chargées en matière organique d’origine animale (urine, fèces) et piétinées par les animaux, sont identifiées comme des habitats larvaires préférentiels pour les espèces associées aux ruminants d’élevage. Parmi ces espèces, certaines sont cependant ubiquistes. Ainsi, les larves de C. obsoletus, espèce abondante et largement distribuée en région paléarctique (carte vectornet), sont capables de se développer dans les litières de forêt, dans des trous d’arbre, dans des résidus d’ensilage de maïs ou dans du fumier en voie de compostage. Cette grande plasticité permet à cette espèce d’être présente dans presque tous les milieux de son aire de distribution, quel que soit le type de sol, du niveau de la mer à plus de 2 000 m d’altitude, en pleine forêt ou dans des habitats anthropisés comme les élevages. A l’inverse, d’autres espèces peuvent être inféodées à un certain type d’hôte et d’habitat larvaire. Par exemple, C. chiopterus est associé aux bovins et les bouses sont les habitats larvaires de cette espèce. Les espèces de Culicoides classiquement reconnues comme vectrices de virus d’intérêt pour les ruminants domestiques en région paléarctique tempérée non-méditerranéenne (virus de la FCO, virus de Schmallenberg) sont : C. obsoletus, C. scoticus, C. chiopterus, C. dewulfi, C. pulicaris, C. punctatus, C. lupicaris, et C. newsteadi. D’autres espèces sont décrites comme ornithophiles.
Les données sur les communautés d’espèces de Culicoides paléarctiques associées à la faune sauvage sont rares. Une revue non exhaustive de la littérature la plus récente a été réalisée en ciblant les régions européennes partageant les mêmes communautés d’espèces que celles décrites en France. Ces suivis entomologiques ont été réalisés dans des environnements naturels permettant de caractériser la diversité et les abondances spécifiques, parfois les dynamiques des populations. Certains suivis ont permis d’analyser moléculairement les repas de sang des femelles capturées gorgées.
Un suivi entomologique a été réalisé dans deux réserves naturelles (Urdaibai et Salburua) dans la région du Pays Basque, au nord de l’Espagne. Ces réserves sont connues comme zones d’hivernage ou d’arrêt pour les oiseaux migrateurs. Dans chaque réserve, cinq sites ont été suivis entre le 01/07 et le 31/10/2018 (2 sites) et le 01/05 et le 31/10/2019 (3 sites). Les piégeages ont été réalisés avec des pièges lumineux de type CDC appâtés avec de la carboglace, posé 24 h, toutes les deux semaines.
Un total de 4 945 Culicoides a été collecté sur les dix sites représentant 28 espèces. La diversité était dominée par cinq espèces ornithophiles, C. alazanicus (n = 1 238, 24,9 %), C. griseidorsum (n = 1 012, 20,3 %), C. poperinghensis (n = 808, 16,2 %), C. kibunensis (n = 531, 10,7 %) et C. clastrieri (n = 479, 9,6 %). Les espèces C. obsoletus, C. scoticus et C. dewulfi étaient également présentes dans les deux réserves mais plus rares (pour les 3 espèces, n = 66, 1,3 %). La dynamique était univoltine, avec un pic au début de l’été.
L’analyse des repas de sang (53 individus pour 8 espèces) a montré que des espèces ornithophiles (C. griseidorsum et C. poperinghensi) peuvent se gorger sur des mammifères sauvages et inversement, que des espèces mammophiles (C. obsoletus) peuvent prendre un repas de sang sur des oiseaux. Les repas pris sur mammifères sauvages étaient dominés par Cervus elaphus puis Sus scrofa.
Un suivi entomologique dans sept sites avec des communautés de ruminants sauvages importantes a été réalisé entre 2009 et 2010 (juillet à novembre) en Espagne. A chaque site de piégeage (localisé à plus d’1 km d’un élevage de ruminants domestiques), trois pièges à lumière noire ont été installés et mis en action pour trois nuits consécutives de capture, une fois par mois. Les données de diversité et d’abondance dans les élevages domestiques les plus proches étaient issues des données du réseau de surveillance des populations de Culicoides espagnol.
Un total de 102 693 spécimens ont été capturés représentant 40 espèces. Le nombre moyen d’espèces est supérieur dans les sites de ruminants sauvages (18) comparés aux sites de ruminants domestiques (13). Au moins une espèce d’intérêt vétérinaire (C. imicola, ou espèces des « groupes » Obsoletus ou Pulicaris) était présente à chaque site de capture.
Les communautés d’espèces aux sites avec des ruminants sauvages et domestiques étaient similaires (analyses de similarités (ANOSIM), global R = 0,175, p = 0,250), indiquant que la présence d’hôtes n’affecte pas la composition d’espèces des communautés.
Un total de 264 femelles gorgées, issues du suivi entomologique décrit ci-dessus, a été analysé afin d’identifier l’origine des repas de sang. Un total de 114 repas de sang a pu être identifié pour quatorze espèces de Culicoides dont C. obsoletus, C. scoticus, C. punctatus et C. imicola. Douze hôtes ont été identifiés (6 espèces de mammifères et 6 espèces d’oiseaux). Pour les repas de sang pris sur mammifères, les hôtes les plus fréquents étaient le cerf élaphe (C. elaphus, 66,7 %), l’espèce humaine (Homo sapiens, 13,0 %) et le daim européen (Dama dama, 6,1 %).
Un suivi entomologique a été réalisé dans le parc régional de Verkiai dans le nord de Vilnius, Lituanie. Ce parc est largement forestier, sans présence de ruminant domestique mais avec des communautés riches d’oiseaux et de mammifères sauvages. Des pièges à lumière noire de type OVI ont été posés en hauteur, une nuit/semaine de fin avril à mi-octobre en 2016 et 2018, et d’avril à juin en 2019, pour un total de 52 nuits de captures.
Un total de 7 332 femelles représentant 22 espèces a été capturé. Les espèces les plus abondantes, quelle que soit l’année, étaient C. obsoletus et les autres espèces du Groupe Obsoletus, puis C. kibunensis et C. impunctatus. Culicoides punctatus et C. chiopterus présentaient des abondances fortes certaines années. Le pic d’abondance a été observé en juin.
En France, un suivi entomologique a été réalisé entre juin et fin août 2008 dans cinq régions connues pour la présence importante de faune sauvage (Alsace, Bourgogne, Pyrénées, Alpes et Haut-Languedoc). Dans chaque département, un à dix sites ont été échantillonnés avec un piège à lumière noire de type OVI (1 à 4 nuits de capture consécutives). Les données de diversité et d’abondance des fermes les plus proches étaient issues du réseau de surveillance des populations de Culicoides français.
Un total of 51 380 Culicoides représentant au moins 30 espèces a été capturé. Les espèces les plus abondantes dans les sites naturels étaient C. obsoletus s.l./C. scoticus (59,1 %), C. furcillatus (17,7 %), C. achrayi (7,8 %), C. punctatus (6,1 %), C. pallidicornis (3,2 %), C. kibunensis (1,5 %), et C. festivipennis (1,5 %). Dans les cinq fermes sélectionnées, les espèces les plus abondantes étaient C. obsoletus s.l./C. scoticus (76,3 %), C. chiopterus (4,9 %), C. achrayi (2,9 %), C. pulicaris (2,6 %), C. lupicaris (1,9 %), C. dewulfi (1,4 %), et C. vexans (1,4 %).
Un total de 70 femelles gorgées a été identifié : dix sur bovins Bos taurus, six sur ovins Ovis aries ou mouflon Ovis musimon, cinq sur chevaux Equus caballus, neuf sur cerf élaphe Cervus elaphus, deux sur chevreuil Capreolus capreolus, un sur chamois Rupicapra rupicapra, et deux sur oiseau (genre Sylvia). Deux espèces, C. obsoletus et C. achrayi, ont été retrouvées gorgées à C. elaphus.
Conclusion
Ces travaux menés dans des milieux de forte présence de faune sauvage montrent que :
Ainsi, les analyses de diversité et des comportements trophiques des espèces présentes en milieu naturel soutiennent l’hypothèse qu’elles peuvent servir de pont (bridge vector) entre les hôtes sauvages et les hôtes domestiques et jouer un rôle dans la transmission de virus entre les deux compartiments.
En ce qui concerne les implications de ces résultats pour la transmission des orbiviroses aux ruminants, très peu de données internationales sont disponibles sur l’infection des ruminants sauvages par le virus de la maladie hémorragique épizootique (EHD), en dehors des données nord-américaines. En Europe, à ce jour, un seul cas sauvage d’EHD a été détecté, sur un cerf élaphe (Cervus elaphus) (plus d’information dans le BHVSI-SA). L’expérience la fièvre catarrhale ovine a montré que les populations d’ongulés sauvages ne jouaient pas de rôle majeur dans la transmission du virus aux ruminants domestiques.
Références
Bernotienė, Rasa, Galina Bartkevičienė, et Dovilė Bukauskaitė. 2021. « The Flying Activity of Biting Midges (Ceratopogonidae: Culicoides) in Verkiai Regional Park, Southeastern Lithuania ». Parasitology Research 120 (7): 2323‑32. https://doi.org/10.1007/s00436-021-07147-2.
González, Mikel A., Fátima Goiri, Sean W. J. Prosser, Aitor Cevidanes, Luis M. Hernández-Triana, Jesús F. Barandika, Paul D. N. Hebert, et Ana L. García-Pérez. 2022. « Culicoides species community composition and feeding preferences in two aquatic ecosystems in northern Spain ». Parasites & Vectors 15 (1): 199. https://doi.org/10.1186/s13071-022-05297-5.
Rossi, Sophie, Thomas Balenghien, Cyril Viarouge, Eva Faure, Gina Zanella, Corinne Sailleau, Bruno Mathieu, et al. 2019. « Red Deer (Cervus Elaphus) Did Not Play the Role of Maintenance Host for Bluetongue Virus in France: The Burden of Proof by Long-Term Wildlife Monitoring and Culicoides Snapshots ». Viruses 11 (10): 903. https://doi.org/10.3390/v11100903.
Talavera, S., F. Muñoz-Muñoz, M. Verdún, N. Pujol, et N. Pagès. 2018. « Revealing Potential Bridge Vectors for BTV and SBV: A Study on Culicoides Blood Feeding Preferences in Natural Ecosystems in Spain ». Medical and Veterinary Entomology 32 (1): 35‑40. https://doi.org/10.1111/mve.12263.
Talavera, Sandra, Francesc Muñoz-Muñoz, Mauricio Durán, Marta Verdún, Anna Soler-Membrives, Álvaro Oleaga, Antonio Arenas, Francisco Ruiz-Fons, Rosa Estrada, et Nitu Pagès. 2015. « Culicoides Species Communities Associated with Wild Ruminant Ecosystems in Spain: Tracking the Way to Determine Potential Bridge Vectors for Arboviruses ». PLOS ONE 10 (10): e0141667. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0141667.
Ce document créé dans le cadre de la Plateforme d’épidémiosurveillance en santé animale (ESA) peut être utilisé et diffusé par tout média à condition de citer la source comme suit et de ne pas apporter de modification au contenu « © https://www.plateforme-esa.fr/ »
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Voici une punaise des milieux humides. Cymus glandicolor, de la famille des Cymidae, se nourrit des graines de joncs, laiches, scirpes et luzules. J’ai obtenu ce couple en secouant les inflorescences d’une grosse touffe de Carex paniculata au bord d’une mare et je l’ai invité à s’installer sur une feuille sèche de cette plante pour la photo souvenir.
L’espèce est reconnaissable au trait clair sur le scutellum (petite pièce triangulaire en arrière du pronotum) et aux bandes sombres sur les ailes.
Retrouvez une autre habitante des caricaies :
Coccidula rufa
Source :
Cymus glandicolor, par British Bugs
nohra.salomon a ajouté une photo au pool :
Nouvelle coupole de l'Hôtel de ville de Créteil
dimanche 4 juin 2023
La petite tache sombre à côté de la tache orbiculaire m’oriente vers les Agrotis. J’utilise le critère de la forme de l’antenne pour cerner l’espèce. L’antenne de ce mâle est pectinée su les 3/4 de sa longueur, ce serait donc Agrotis clavis. De plus les ailes antérieures sont très contrastées et plus larges que chez l’espèce voisine plus commune Agrotis segetum. Pour conforter la détermination, il serait utile d’apprécier les autres critères, notamment la couleur de l’aile postérieure que l’on entrevoit entre les antérieures.
Les chenilles d’Agrotis clavis vivent sur les Polygonaceae et d’autres plantes basses.
En Ile-de-France, ce papillon est présent mais semble rare.
Retrouvez d’autres Agrotis :
Trois Agrotis
Sources :
Agrotis clavis, par Lepiforum
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samedi 3 juin 2023
J’aime bien la nuit secouer les branches des saules, il en tombe parfois de jolis cadeaux. Ce Tortricidae resplendit dans mon bac blanc. Ses bandes et taches argentées le rendent aisément reconnaissable. Olethreutes arcuella n’est pas rare mais sa chenille est très rarement observée car elle consomme des feuilles mortes, de bouleaux notamment et sans doute d’autres espèces d’arbres.
Retrouvez d’autres Tortricidae :
Pseudargyrotosa conwagana
Pandemis corylana
Source :
Olethreutes arcuella, par Lepiforum
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vendredi 2 juin 2023